Bonjour monsieur Monet

Bonjour, monsieur Monet, que faites-vous donc là

Le chevalet planté sur le pont de l’Europe ?

 Je peins. J’attends mon ami Caillebotte

Celui qui peint ceux qui rabotent.

J’attends aussi mon temps, mon heure.

  Mais que peignez-vous ? – La tranchée

Où les Batignolles éventrées

Laissent monter l’encens des fumées ferroviaires

A la gloire du siècle qui vient.

Il me reconnaîtra, qui sait, ce siècle où les engins

Feront s’ouvrir tant de tranchées

Où le moindre ouvrier se croira un Titan

pulvérisant les vieux pâtés

et les préjugés – C’est certain !

 Le museau des locomotives

communique à mon bras son énergie qu’avive

une fureur contemplative.

-Moi, il m’envoie aux yeux une escarbille !

… Mais que fait Caillebotte ?

 Il rabote ! Il met à nu le bois du vieux siècle et il frotte !

Il peint des ouvriers, des balcons, des fabriques

_Et vous, monsieur Monet ? – Moi des ponts,

des verrières, des gares, où se pavanent des trains

qui ne sont pas encore traintrain

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