Le printemps est entré par la porte
Il a giflé le carillon. Mes cils
se sont pris dans les pistils. Éclore
a cassé ses lunettes comme une coquille.
Dans la cuisine, des éclats de rire
dessinent des triangles aigus
C’est le bruit que font mes enfants
domestiquant l’instant critique
où l’on passe de petit à grand
Il fait bon avoir eu trois enfants, trois humains
à la croisée de deux destins
Sous le forsythia du jardin
j’écoute leurs bruits de grillons
Ils font tinter la fin du millénaire
dans des verres à moutarde clairs
Dans des bols de porcelaine blancs
Le charivari des enfants
s’immobilise comme un chant
lancé jusqu’à la fin des temps
Et je m’éloigne à pas menus
dans un étonnement cristallin
Sous le forsythia du jardin
Il n’est pas si aisé d’entendre
la chair vagir de ses enfants surpris
dans l’étrange acte de grandir