Écrire, c’est faire retraite. Écrire, c’est méditer.
Écrire, c’est s’arrêter. Écrire c’est galoper.
Écrire, c’est se souvenir.
(Ce, en contrepoint de ma lecture du livre d’Abdennour Bidar Histoire de l ‘humanisme en Occident.
Avec entre autres une lecture de Job que je trouve très frappante, on édulcore tellement la Bible ! les textes ! les livres !
À savoir que Job atteint par la volonté de puissance du Dieu l’engueule et lui fait procès, « je sais que j’ai raison ! », ce qui veut dire que dans le texte l’homme est mieux dieu que le Dieu, sait mieux le bien et le mal, sait mieux que le dieu ce qui est divin et fait son éducation, a une âme plus divine que le Dieu – il dit le Dieu – , et c’est lui qui indique à Dieu ce qu’est être Dieu : être dieu, ce n’est pas jouer aux dés avec Satan. Ici, l’homme a plus de dignité que Dieu.
Avec Le livre de Bidar je me sens curieusement en phase.
Quand il dit qu’il n’est pas besoin de croire en dieu pour avoir besoin d’un horizon de grandeur, d’un arrière-plan de grandeur et de hauteur à l’existence humaine, à sa propre existence, que Dieu existe ou non n’est peut-être pas l’essentiel, mais de concevoir l’idée d’une valeur suprême, le souverain bien, le souverain beau, pour nous, qui nous tire à dépasser nos supposées limites, à aspirer à un peu plus qu’à ce qu’on a sous la main. Est-ce de l’idéalisme ?? de l’idéalisme stérile ?
Curieusement en phase avec lui qui dit mieux que moi peut-être les choses que j’ai du mal à formuler, du moins à faire entendre.)
Petit théâtre.
En épluchant mon échalote dans la cuisine, dialogue imaginaire :
je m’entends lui dire : la culture ce n’est pas savoir des choses, c’est avoir la curiosité des choses.
Étymologie : l’ancien nom de l’échalote dérive du latin ascalonia (cepa) « (oignon) d’Ascalon ». Ascalon est une ville située dans le pays des Philistins dans le territoire actuel d’Israël (aujourd’hui Ashkelon). Les Francs auraient rapporté les échalotes en Occident après le siège d’Ascalon, à la fin de la première croisade. Le centre d’origine de l’échalote se situe en Asie centrale.
« Sous quelle forme sous quelle forme sous quelle forme
bruit tout ce qui s’évapore ? et trouvant l’exaspération
cherchant l’éclair ou l’illumination et broyant du nescafé noir
tout ce tout qui pétille, tout ce petit port qui fermente
se fabrique-t-il à l’aurore un cerveau humain ? Chante-t-il ?
Sous quelle forme sous quelle forme accessible
Tout ce qui s’agite et palpite et se trémousse et mousse
dans l’univers se met-il à pépier comme le merle du square ?
puis virevolte et gonfle et fait la montgolfière
pète d’un bonheur bref pour s’envoler très fier
dans l’écume et dans l’atmosphère ?
ce gentil vol plané parfumé à la nostalgie
et iodé de grandes espérances, il faut rester assis
pour l’admirer – quand s’y cramponne un peu de transe
et s’immobiliser
dans l’obstination des enfances et des commencements
qui balancent entre zéro et un. Ô belle escarpolette
des petits matins d’ocre juponnés de dentelles
jolis mollets galbés d’éclats de soie
crevant l’écran du temps à coup de talonnettes et de rubans de taffetas.
sous quelle forme sous quelle forme sous quelle forme
– prends ton fusain et boucle mais sans fermer la porte,
– laisse des blancs – n’encercle pas, escorte !
– laisse des pores à la peau laisse des peu des trop peu à ce trop
au cheval qui galope consens à mettre une selle
trop de jambes dis-tu trop de branches de secousses de ramilles convulsives
de gouttelettes éparses il fallait fêter ça
arrêter la fuyarde et la prendre au lasso dans un creux de repos
ah, le repos ! Tu ne sais pas. Trop semblable à la mort ?
Si peu d’instants sans courir après quelque chose
toi dont la hanche est douloureuse toi qui es presque infirme
tout en toi court et se démène comme pour une olympiade
électrisée, dormeuse, essoufflée et coureuse, inerte et trop rapide,
paresseuse et surexcitée, cherchant la transe et trouvant l’acide et le grincement de dents
le courroux et l’emportement au sein de la contemplation
tétant le lait de ces maternités arides
et la plupart du temps l’après-midi te trouve
engourdie gourdiflote léthargique
(Populaire) (Vieilli) Personne un peu niaise.
Aimé s’esclaffa : « Mais voyons, grand gourdiflot, répondit-il au mécanicien, qu’il convainquit aussitôt, c’est justement Mlle Simonet, et Monsieur, qui te commande de lever ta capote, est justement ton patron. » — (Marcel Proust, Sodome et Gomorrhe, 1921)
gourdiflote, mot d’enfance existe-t-il encore ??
un travail un article sur quelques mots d’enfance
perclus et retrouvés
madeleines parentales
une chronique »
ainsi parlait à son oreille le début de l’après-midi
juste avant le corps de l’action, l’élévation de la colonne et de ses vingt-quatre vertèbres
empilées comme autant de chants de l’Iliade
– ou bien trente-trois vertèbres ?
Ce sont là choses tournantes et redressantes n’est-ce pas ?
Dont n’ont besoin ni les méduses ni les paramécies
– ni le petit virus que j’ai attrapé et qui me fait la nuit tousser ?
OK il sera temps de sucrer tous ces mots inutiles et fluets quand tu te reliras,
mais elle sait bien que se relire n’est pas du tout facile
et couper douloureux quoi qu’utile
et elle en rajoute à plaisir en se disant je pourrais désenkyster ce petit bout de digression
le servir dans un autre repas
Telle quelle assise devant l’écran et les doigts fonçant dans les touches
le début de l’après-midi qui avait trop bu – oh, rien, rien que du cidre –
son envie de bondir dans le bus 62 pouvait attendre un peu
quoique passer l’après-midi assise, enclose et fourmillante
ne fût pas l’idéal – il fut dur de comprendre
qu’écrire est une retraite mais sans dieu ni jésuite baraqué ni père spirituel russe
ni tropaires enivrants du patriarcat de Moscou
sans le moindre monseigneur Antoine, sans le moindre père Laplace
et sans le moindre Zeus Jupiter Jehovah ou Yaveh
une retraite sans étayage
autant dire sans la moindre aide externe que ces quelques gouttes de cidre breton
acheté hier car il était en promotion et c’était du cidre Raison
si peu de pères – c’est ennuyeux d’en revenir à ce délabrement
Les échafaudages qui pourraient vous tenir debout sont manquants
juste des bouffées bizarres des mots qui viennent tout seuls des syllabes pompettes
ce n’est pas là brise légère.
on se drogue de ce qu’on peut. Parfois même sans rien on le peut
juste un lambeau d’après-midi une ombre un souvenir qui surgit
comme un fantôme ou un cadavre exquis
quelques idées quelques digestions inabouties
quelques aspirations qui vous importent et dont on sait
qu’on aura bien du mal à en faire une action,
on est là l’estomac cabossé de possibles
les possibles vous boxent et vous restez KO
vous décidez alors d’appeler quelqu’un de réel et qui vous est cher
– mais l’heure est mal choisie votre coup de fil tombe en torche
le téléphone du susnommé Possible est sous répondeur.
vous laissez un message embrouillé
(vous ne vous rendez même pas compte que vous écrivez ce texte-ci juste pour le lui communiquer
et vous ne vous rendez pas compte que peut-être de l’autre côté son silence vous a requise
peut-être en ce moment même un petit sifflet vous appelle ? (juste une sibilation)
La sibilance est le signe d’une gêne respiratoire qui peut être due à un corps étranger ou à une maladie comme l’asthme. La réduction du calibre des voies aériennes joue le rôle de « sifflet ». On parle alors de « râles sibilants ».
Maintenant retentit une sonnerie stridente. Vous répondez « j’écoute »
– aussitôt la personne, ou le robot, raccroche ce n’était qu’une publicité, ou peut-être un cambrioleur.
Qui donc a dit dieu vient comme un voleur ?
– Un enragé ce type était violent il poussait les gens aux extrêmes
tout le contraire de la sagesse, je me méfie de ces jongleurs de paradoxes
et surtout de celui-ci
je me souviens très bien de lui
Dont les sculpteurs pendant les siècles qui ont suivi sa mort ont fait mille effigies,
mille portraits en trop beau séducteur androgyne
barbiche et mise en plis, vénusté de demi-dieu, accrochant l’émoi des enfants
et la libido tourmentée des fillettes,
les déversant dans un panier percé, à perte.
Je me souviens de lui avec méfiance
Méfiance qui me rend tellement triste.
Aucune confiance en ces pousseurs d’excès
dont je ferais aisément partir ma propre trace puisque
élevée dans un nid tout grouillant de superbes injonctions
paradoxales très bien tressées entre elles
pour étrangler les velléités
j’en connais un rayon de miel
– et les capacités réelles.
Mais qu’est-ce que j’attends pour me lever aller faire un tour en ville prosaïque ?
un mardi jour très prosaïque prendre un bus y jucher mes vingt-quatre vertèbres
tournantes et redressantes – ou plus exactement trente-trois !
– s’il vous plaît, dites trente-trois, trente-trois : ce chiffre me dit quelque chose…
… Mais à qui envoyer ce texte ??
Éternelle question ! à qui parler ! S’adresser ! Et quel est l’interlocuteur !!
je suis trop seule ça fermente
alcooliser le jus de pomme alcooliser le jus de l’homme et de la femme
telle est la spiritualité n’est-ce pas ??
le sang la sève et le jus d’homme
Je crois bien que le saint esprit est comme moi :
il en a assez de Jésus-Christ.
(Du moins de ce qu’on en dit ???)
tous ces textes écrits pour personne.
(Je ne sais pas me faire entendre)