C’est ainsi que passant de l’île à l’avenue
la femelle de l’homme n’a pas trop de deux jambes
pour effectuer le pont et l’écart périlleux
qui la lie à deux mondes.
À ma gauche est la mer
avec son chèvrefeuille enroulé à la vigne
et la mauve qui grimpe au mur de pierres roses
immeuble de lézards ces copropriétaires
de mon identité lorsqu’au doux soleil d’août
je me brûle le cœur et mouille mes orteils.
Mais il faut bien passer le paquebot si beau
remettre pied en ville et humer les palais
il faut sonner aux portes il faut cogner aux vitres
entrer dans les couloirs et s’asseoir à des tables
il faut prendre sa place il faut gagner sa vie
comme un joyau perdu qu’on ne possède plus
il faut courir après ce qu’on détient sans cesse
rencontrer des humains qui vous donnent la mort
avec un grand sourire et des yeux de détresse
oui il faut s’empresser de rencontrer l’averse
en l’appelant l’amour – oui il faut aller bien
c’est un devoir je crois c’est un devoir je crains
et dans cette matière j’ai zéro sur vingt.
Sans cesse il faut prouver que l’on existe encore
Nul ne peut accepter qu’on ne soit que ce corps
ce corps incandescent ce corps indifférent
Il faut montrer encore que l’on fait des romans
que l’on a des amours que l’on a des amants
qu’on fait des calembours et qu’on a quelques dents
Il te faut justifier pourquoi tu n’es pas morte.