Je savais quelque chose de bizarre
je savais quelque chose que vous savez tous
je savais quelque chose de très difficile à dire
je savais quelque chose de presque impossible à traduire
Je savais quelque chose de stupéfiant
Je savais quelque chose que vous connaissez tous
– c’est le creux de ma chambre qui me le souffle ce matin
alors que j’enfile mes chaussettes.
Je savais que j’étais une sorte de jamais plus, un hapax
je savais que j’étais cette grandeur
je savais que j’étais cette hauteur
(et certes je n’étais pas souvent à la hauteur de ma hauteur).
Je savais quelque chose de poignant
je savais que cette verticalité était en moi
je savais agiter les bras
je faisais signe à l’intuition
Comment dire cette chose ? Il me reste à l’écrire
ce lieu-dit ce corps-là ce bout de temps compté qui se promène
et bouscule l’atmosphère en occupant sa place
« Pousse-toi de là, que je m’y mette, Univers ! »
Milieu divin, humain, ou planétaire
fais-moi place, pousse ton cul ! Offre-moi ta matière
Tu le sais bien, vieux frère, que quand je serai morte
il n’y aura plus jamais au monde ce duo, inspirer expirer, cette chair
cette dualité ce rythme ce moi et ce non-moi
ce jaillissement que faute de mieux
j’appelle Je
Ce que quelqu’un ici appelait l’autre jour la subjectivation
– Cher ami, trouve un autre mot, s’il te plaît – un mot vulgaire et simple –
contente-toi de l’ordinaire – et trouve
une tournure de place de village
Juste une petite histoire, un conte
Juste une chansonnette avant de m’endormir
Juste un conte à dormir debout